dimanche 29 avril 2018

Vers une meilleure connaissance des milieux marins de Saint-Paul et Amsterdam

Des 3 districts austraux, Saint-Paul et Amsterdam est celui pour lequel nous disposons le moins de connaissances sur les milieux marins. Peu de programmes marins scientifiques ont concerné à ce jour spécifiquement le district. Ainsi, la dernière campagne d'exploration de la biodiversité de ce secteur remonte à 1986. Depuis, les avancées technologiques et conceptuelles permettent d'explorer différemment la biodiversité tout en intégrant une problématique de la gestion et de la conservation des espèces et des habitats. Les caractéristiques océanographiques et géomorphologiques couplées aux données biologiques disponibles laissent présager une biodiversité benthique (ensemble des organismes aquatiques vivant à proximité du fond) et pélagique (vivant dans la colonne d'eau) extrêmement riche et potentiellement vulnérable.

C'est pourquoi l'amélioration de la connaissance sur les milieux marins de Saint-Paul et Amsterdam apparait comme un objectif prioritaire du plan de gestion de la Réserve Naturelle. Cela passera par la mise en œuvre de campagnes océanographiques, côtières et hauturières pour réaliser des inventaires faunistiques et floristiques, et caractériser les communautés benthiques et pélagiques.

En attendant le développement d'un plan d'acquisition de connaissance, certaines données sont obtenues grâce à la pêche.

L'Austral est un navire de pêche familier des hivernants de l'île Amsterdam. Il pêche essentiellement de la langouste, mais réalise aussi quelques missions scientifiques grâce aux 2 agents des TAAF embarqués à bord : un contrôleur des pêches et un agent de la Réserve Naturelle.

Lors de sa dernière marée, un dispositif de prise de vue sous-marine a été créé, avec la collaboration de l'équipe machine de l'Austral. Il permet de descendre à des fonds supérieurs à 50 m, et jusqu'à 120 m.

Une vingtaine de stations ont été ainsi visitées par ce dispositif, et pour la première fois, nous avons pu découvrir les fonds marins des îles Saint-Paul et Amsterdam à de telles profondeurs.


            
Image obtenue entre les lieux-dits « Pointe Schmith » et « Roche Nord », par 61 m de fond © Marc LEMENAGER – TAAF

Image d'habitat benthique à « Roche Nord », par 61 m de fond © Marc LEMENAGER – TAAF

Image obtenue au lieu-dit « Pissotières» sur la côte ouest d'Amsterdam, par 72 m de fond © Marc LEMENAGER – TAAF

Première observation de cabots de fond (Polyprion oxygeneios) dans leur milieu naturel © Marc LEMENAGER – TAAF

Images obtenues à Ribault, sur la côte nord-est d'Amsterdam, par 102 m de fond © Marc LEMENAGER – TAAF

Images obtenues à Ribault, sur la côte nord-est d'Amsterdam, par 102 m de fond © Marc LEMENAGER – TAAF
Cabot de fond (P.oygeneios) à  « Marques Jaunes », sur la côte nord d'Amsterdam, par 54 m de fond © Marc LEMENAGER – TAAF
                                                                   
Nouveau dispositif avec caisson « grandes profondeurs » © Marc LEMENAGER – TAAF

samedi 14 avril 2018

Les entrailles de l’île Amsterdam

Dimanche 8 avril - 6h30. La base est debout et 10 d'entre nous, comme d'autres la veille, partent pour une expédition renversante; l'ascension de Vénus.

Vénus est un bonheur qui se mérite. Il est bon, afin de pouvoir en jouir pleinement, de surmonter diverses épreuves, prévisibles ou inattendues.

La première est d'arriver en un seul morceau et vivant après la traversée du « Grand Tunnel ». Grand Tunnel c'est le nom donné à une coulée de lave de 1500 mètres de long qui relie la base Martin de Viviès au cratère de Vénus. Sur Amsterdam, des coulées il en existe des centaines, peut-être même plus, elles ont été créés naturellement lors des premières éruptions volcaniques il y a des centaines de milliers d'années. A cette époque, la lave en fusion jaillissait des profondeurs de la Terre, refroidissait sous diverses formes et creusait ces immenses tunnels. Avec le temps, ces coulées de lave façonnées par l'érosion du sol environnant ont formé le caractère si particulier d'Amsterdam.

Grand Tunnel © Chloé TANTON


Aux premières lueurs il faut donc gravir la Roche Godon à son rythme, sans chercher à suivre les bourrins qui caracolent loin devant, ce qui pourrait être fatal pour la suite du parcours. Il convient ensuite d'éviter que son sac à dos se transforme en collier à arrêtoir et vous emmène dans les premiers gouffres, spectacle grandiose mais qui présage un atterrissage délicat. 

Arrive alors l'épreuve des bourbiers, cimetière de bottes ensevelies à jamais, que l'on traverse hagard à grands renforts de fiole miracle. 

La descente dans les profondeurs de la Terre est aisée mais il faut maitriser sa vitesse car le sol instable et glissant peut vous faire perdre pied et c'est comme cela que l'on se retrouve empalé dans une touffe de scirpes accueillante. 

© Mathias RÉGNIER

Après le passage des cavités, à effectuer en scaphandre si la météo est mauvaise, la fin du parcours n'est qu'une formalité, à moins que votre cœur ne lâche devant Vénus éblouissante ou encore que les abimes de l'île décident de vous intégrer à leurs lits d'ossements déjà bien garnis.

Vous voilà donc au pied du cratère, prêt à profiter de Vénus et de cette partie de l'île, innocent que vous êtes ! Il vous reste encore à endurcir le soleil de plomb qui vous rougira les épaules désormais incapables de porter le moindre sac à dos rafistolé et à supporter la belle fratrie qui vous accompagne dont les rires incessants, restent l'arme la plus redoutable.

© Chloé TANTON

© Cyprien GRIOT

Chloé - Ornithologue