mardi 27 septembre 2022

LES JEP A AMS – LA DÉCOUVERTE

La découverte du patrimoine de la Nouvelle-Amsterdam n’est pas chose facile si vous n’avez pas le profil d’un aventurier. Loin des sentiers battus, à moins qu’ils ne le soient par les vents, on ne peut réserver sa visite sur internet pour découvrir tel haut lieu de la République (même la Résidence) ou tel jardin botanique dissimulé derrière de larges murs anciens. Nous sommes bien loin des interminables queues et des parquets cirés. Pour attendre le Graal, il faut d’abord avoir parcouru les mers australes et franchi les 40e rugissants. Vous devez vous armer de patience pendant des jours et des jours de mer, agrippés pour les uns à la table du Marion Dufresne qui vous régale avec opulence (Spasfon® largement préconisé), et pour les moins amarinés, à la cuvette, au péril de leur estomac et à grand renfort d’anti-nauséeux. Si vous êtes enfin là, vous allez avoir l’extrême privilège de découvrir quelques-uns des secrets bien gardés de cette île parmi les plus isolées au monde. 
 
Source BNF - Gallica

La préparation

Afin d’offrir le meilleur visage d’Amsterdam aux heureux participants de ce week-end du patrimoine, de nombreux hivernants se sont mobilisés, documentés et organisés. Ce travail de l’ombre, très chronophage, a permis de mettre en place plusieurs circuits simultanés, guidés par des professionnels extrêmement compétents et pluridisciplinaires. Je vous propose de découvrir ces pépites une fois que vous serez équipés. Aussi, pour votre bien-être et votre sécurité, je vous demande de bien vouloir laisser de côté votre chemise hawaïenne, votre tailleur préféré ou votre paire d’escarpins afin d’enfiler vos bottes en caoutchouc « Le Bouquetin » et vos cirés labellisés (même jaune). Munissez-vous d’une lampe frontale, d’un casque à votre taille et d’une gourde d’eau (pleine c’est mieux, même si ça alourdi votre tote bag TAAF acheté il y a peu à la boutique). Vous êtes prêts ?

Le Grand Tunnel dit Grande Coulée

Par petits groupes, suivons d’abord notre spécialiste de la Réserve Naturelle pour nous diriger vers les cratères Vénus (ainsi nommés en souvenir de l'expédition scientifique menée par Charles VÉLAIN, venu en 1874 pour observer le passage de la planète Vénus devant le soleil, le 9 décembre 1874). Vous ne tarderez pas à comprendre qu’il n’est pas avantageux d’avoir les jambes trop courtes. Peut-être avez-vous déjà le souffle court alors que nous découvrons tout juste le jardin malgache (nommé ainsi car exploité par les ouvriers malgaches en hivernage). Le temps de quelques explications bienvenues, nous ajustons nos tenues afin de les adapter au mieux à la montée qui nous attend. Progressant sur un sentier à peine visible, le pisteur botaniste nous conduit, s’ébahissant parfois sur des espèces indigènes pendant que nous, simples novices gonflés d’ignorance, nous émerveillons de voir si loin de nos campagnes un pissenlit ou une marguerite. Arrivés enfin à l’entrée de la Grande Coulée, nous profitons de la proximité du Vénus inférieur pour en découvrir toute la beauté et les particularités végétales. Le sillon en pointillés, comme tracé par un dessinateur après la Bamboche (événement local très suivi, se déroulant le plus souvent le 5e jour de la semaine en période de lune gibbeuse), nous montre le chemin qui nous attend. Cette longue coulée basaltique, évidée après son refroidissement en surface, présente une suite de nombreux effondrements de sa voûte. Elle pourrait avoir une dizaine de milliers d’années. Chaque anfractuosité amène sont lot d’émerveillement. Quand ce n’est pas une espèce végétale particulière qui a trouvé avantage à pousser ici, ce sont les volumes des cavités et le découpage basaltique qui nous surprennent.

                        La Grande Coulée                                       Particularités végétales sur le Vénus inférieur

                        Au bord du Vénus inférieur                                        Déambulation au sein de la Grande Coulée 

 Les pétroglyphes

Ces pierres gravées sont nombreuses sur le district de Saint-Paul et Amsterdam. A ce stade je tiens à rendre un hommage particulier à Yannick VERDENAL, ancien hivernant et auteur d’un ouvrage remarquable sur lequel nous nous sommes appuyés. Nous nous contenterons, et c’est déjà bien, d’en découvrir quelques-unes sur et à proximité de la base. Ces traces témoignent du passage de naufragés, souvent baleiniers, sur ces terres à l’approche délicate.

Quelques exemples dans la base et prêt d'un ancien dépôt de vivres, proche du monument aux morts

Le parcours découverte

C’est un jeu de pistes qui nous permet de découvrir un tout autre visage de notre base où se mêlent toponymie et histoire. Nous passons ainsi du cratère DUMAS (M. Dumas présidait la commission du passage de Vénus devant le soleil, et était chargé d'organiser la mission française d'observation, en 1874) à un ancien abreuvoir à vaches, puis du jardin malgache à Géophy (là où, parait-il, se boit le meilleur café de Lille), de la canardière à Notre-Dame de l’océan (une petite chapelle), de la cabane de Mataf (qui veut dire "matelot" dans le langage des marins) à la cale, d’un ancien dépôt de vivres (avant l’occupation de l’île, ces dépôts étaient mis en place à l’usage des naufragés, comme sur un grand nombre d’îles désertes) à la station météo, du mât de la solitude à la mosquée (ainsi appelé parce-que la tour du bâtiment était surmonté d’un dôme renfermant le système de liaison satellite, l’ensemble laissant penser à une mosquée), du jardin météo à l’Otarie Club (VIP only).

                                                    La carrière du cratère Dumas et le jardin météo
Grotte ayant accueilli l'ancien dépôt de vivres

                                Le dépôt de vivres                                                             La mosquée en 1971

                        La mare aux canard en 1974                                          L'avenue Martin-de-Viviès en 1953

L’accès aux archives

A titre exceptionnel, les hivernants ont pu accéder à certains documents d’archives vieux de plus de cinquante ans, notamment les journaux des premières missions.

Si cette année vous n’avez pu participer à ces journées du patrimoine d’Amsterdam, nous vous invitons d’ores et déjà à prendre vos dispositions pour 2023 car les places sont comptées. 

 

Texte et composition de l'article : JPB - DISAMS