Nous
sommes le 29 novembre.
Le Marion Dufresne nous a quitté depuis trois
jours à l'issue de l'opération logistique n°3/2014.
La
campagne scientifique d'été est lancée. A Amsterdam, elle se
traduit, entre autres, par la présence d'une équipe de paléoclimatologues. La connaissance du climat à travers les âges par l'étude des
sols, ça ne s'invente pas.
Et
en parlant de climat justement, il se trouve que les conditions
météorologiques ne sont pas fameuses depuis l'arrivée de nos cinq
chercheurs. Installés par hélicoptère avec leur camp de base dans
la ravine Coleridge durant l'OP, leur position élevée à proximité
du sommet de l'île leur met la tête dans les nuages qui encombrent
les hauts, entrainant pluies continues et mauvaise visibilité, le
tout dans un contexte de vent fort et constant.
Il
est donc décidé d'envoyer une équipe vers eux à partir de la base
Martin de Viviès pour faire le point et, dans toute la mesure du
possible, les aider à démarrer leurs travaux. Les jours sont
comptés jusqu'à l'OP4 qui devrait intervenir aux environs du 20
décembre et qui verra le retour des Paléos et de leur matériel à
bord du Marion Dufresne.
05H00.
Il fait jour.
Le groupe quitte la base en direction du Mont la Dives,
le sommet de l'île culminant à 881 m.
Nous
montons vers le Sud. La végétation est bien présente, le terrain
verdoyant et parsemé d'anciens tunnels de lave. Nous passons non
loin des deux cratères de Vénus.
Nous
sommes au niveau de la "Mare aux Canards" près du cratère
de l'Olympe, à environ 600m d'altitude. L'environnement a changé.
Les formations volcaniques sont plus apparentes. La végétation est
surtout composée de mousses et de scirpes.
Nous
arrivons rapidement à La Caldeira, grande cuvette encaissée située
au pied de La Dives, côté Nord. C'est une zone de tourbières qui
fait d'ailleurs partie du plateau du même nom et se trouve donc être
une zone protégée, normalement interdite d'accès. En son centre se
trouve le mamelon caractéristique du "Museau de Tanche".
Pour
rejoindre nos chercheurs, nous contournerons donc la Caldeira par les
crêtes.
Enfin,
après 3h de marche nous arrivons à destination, la ravine Coleridge
à environ 800m d'altitude. Nous y découvrons le camp de base des
Paléos qui a un peu souffert des dernières intempéries.
Les scientifiques sont visiblement heureux de nous voir après ces premiers jours compliqués pour eux qui les ont tenu cloîtrés dans leurs abris et éloignés du terrain.
Après
un rapide état des lieux et pour profiter du transfert de beau temps
effectué par l'équipe montante, il est décidé de les accompagner
jusqu'à la limite de la zone protégée, à proximité immédiate du "Lac Bleu". C'est là que se trouve leur lieu de prospection où l'hélicoptère
a déposé la caisse de matériel technique qui va venir compléter
celui que nous aidons à acheminer sur place.
Du haut de la crête que seuls nos chercheurs, couverts par un arrêté préfectoral, ont l'autorisation de franchir durant la campagne d'été, nous les regardons descendre vers "La Grande Marche" qu'ils vont ensuite longer pour rejoindre leur site de travail. Les choses sérieuses vont enfin pouvoir commencer...
L'équipe
Paléo désormais à pied d’œuvre, nous décidons de continuer notre
route vers le Sud Ouest et de pousser jusqu'au "Pignon"
situé à l'extrémité du chemin de caillebotis qui relie le pied du
Mont de La Dives, côté Sud, à la mer. C'est un point de vue
magnifique et impressionnant au sommet des falaises d'Entrecasteaux,
à 720m d'altitude. Un à pic vertigineux au bas duquel on devine la
petite tâche blanche de la cabane des ornithologues et où on peut
voir "la Cathédrale", roche caractéristique pyramidale de la pointe
d'Entrecasteaux qui sépare la côte du même nom de "la Baie du Loup", plage de loups marins, ces otaries emblématiques qui ont été
tellement chassées, en particulier au 19ème siècle, qu'elles en
avaient un moment presque disparu du district.
Le
Pignon dispose également d'un point de vue sur le "Plateau des
Tourbières" côté Nord - Nord Ouest, où nichent les "Albatros d'Amsterdam", autre espèce emblématique réduite à
une colonie unique au monde comptant moins de 200 individus et ayant
fait l'objet d'un précédent article de ce blog.
Les
sacro-saintes règles de la note de service "Sécurité hors
base" en pratique à Martin de Viviès sont là pour nous
rappeler que la circulation de nuit est interdite sur le district et
qu'il est temps de reprendre la route si nous voulons pouvoir
effectuer les heures de marche qui nous séparent de la maison dans
les conditions requises. Un Albatros Fuligineux, principal habitant
des falaises avec les Albatros à Bec Jaune et les Gorfous Sauteurs,
vient nous faire un dernier salut avant notre retour vers La Caldeira
et la descente en direction de la mer, côté Nord.
Clément
GRELLIER Alain
QUIVORON
Magné/Sismologue
Disams
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