mardi 31 décembre 2019

70e anniversaire du débarquement de la 1ère mission à Amsterdam, pilotée par MARTIN DE VIVIES


Ce 31 décembre 2019 est un jour particulier pour le district, pour l'île d'Amsterdam et pour ses hivernants.
Le 31 décembre 1949 à 17h30, une partie de la 1ère mission permanente à Amsterdam pose pour la première fois le pied sur l'île. Elle est dirigée par Paul MARTIN de VIVIES, Ingénieur météorologue. 
C'est donc depuis 70 ans que les missions scientifiques se relaient sur l'île d'Amsterdam, dont voici un résumé de son histoire.

Les Îles de Saint-Paul et Amsterdam ont été repérées pour la première fois le 18 mars 1522 par les compagnons de MAGELLAN (tué un an auparavant aux Philippines) et notamment par Juan Sebastian ELCANO (ou De Elcano), explorateur et marin basque espagnol, commandant du navire La Victoria.

Juan Sebastian ELCANO








Le premier homme à fouler le godon* semble être Van Vlaming, corsaire hollandais, à la fin du XVIIe siècle.
* Argot désignant tout ce qui est pierre ou roc, et qui donnera le nom de Roche Godon, premier nom de ce qui est l’actuelle base.

Les îles Saint-Paul et Amsterdam commencent à intéresser les navigateurs, et voient les passages de plus en plus nombreux d'espagnols, de portugais, de hollandais, d'anglais et de français, en particulier pour chasser les baleines et les otaries, qui ont pratiquement disparu au cours du 19e siècle
En 1814, elles tombent entre les mains de la couronne britannique, sans qu'elles soient occupées. Le  statut des deux îles reste incertain pendant une cinquantaine d'années. 

En 1892, la France décide de prendre officiellement possession des îles, et le 27 octobre, le drapeau français flotte pour la 1ère fois à Amsterdam. Le district est donc français depuis 127 ans.

Après ces quatre siècles d’histoire, de sa découverte à son intégration dans les terres de France, l’île d’Amsterdam se retrouve presque à l’abandon et sa souveraineté est menacée.
Pendant et après la 2e guerre mondiale, les îles Saint-Paul et Amsterdam sont peu visitées, bien que plusieurs pays cherchent à implanter des stations radio-météo ; les anglais en particulier songent à installer une station météo à Saint-Paul, puis abandonnent ce projet. 
Martin de Viviès annonce :
"Ces points délaissés, perdus dans les immensités des mers australes, ne vont pas tarder, à cause même de leur isolement, à être l’objet d’un intérêt international."
Il avise encore :
"À une époque où les besoins sans cesse croissants des utilisateurs de la météorologie obligent certains pays, dont la France, à entretenir à gros frais, des stations flottantes (frégates météorologiques de l’Atlantique), une île située à des distances sensiblement égales (de l’ordre de 3 500 km) de l’Antarctique, de l’Australie et de Madagascar, devait nécessairement recevoir une station météorologique permanente. Il devenait non moins nécessaire de confirmer, par la présence, des droits que le défaut d’occupation et l’évolution du droit international auraient pu rendre contestable."
 La France reprend donc quelques années plus tard les intentions anglaises, alors que plusieurs nations entretiennent des stations sur les océans.
 - Le 30 juin 1949 sont débattues les modalités d'exécution de ce projet, en conférence interministérielle à l'Hôtel Matignon, à la suite de quoi, un projet de loi a été rédigé et voté par le Parlement courant juillet de la même année. 
La direction de l'établissement central de la météorologie nationale compose une équipe qui prend son service le 16 août.


- Le 12 novembre 1949, la navire langoustier "SAPMER" quitte Marseille avec à son bord 5 météorologues (dont Paul MARTIN DE VIVIES et Alfred FAURE - qui a donné son nom à la base de Crozet) - 4 radios, un infirmier et 135 tonnes de matériel. Il récupère lors de son escale à La Réunion 15 autres personnels, ce qui porta les effectifs de la première mission à 25. 


- Le 31 décembre 1949 enfin, le navire mouille devant Amsterdam et repère un point de débarquement. "C’est une jetée naturelle constituée par une coulée de lave, qui s’avance d’une quarantaine de mètres dans la mer. Le débarquement y est possible par beau temps, mais le matériel ne peut y séjourner sous peine d’être enlevé [par la mer]. Il faudra donc, tout en débarquant, ouvrir à la dynamite une voie d’accès vers l’intérieur, à travers une sorte de moraine d’énormes blocs rocheux." Martin de Viviès

La première mission permanente aux terres australes françaises, prend pied sur l’île d’Amsterdam, sous les ordres de M Martin de Viviès
 - Le 8 janvier, le commandant du SAPMER (Commandant VERDAVAINNE) annonce qu'un de ses hommes, RIBAULT, a disparu le long du bord, entraîné par le glissement de matériaux. Il ne sera jamais retrouvé.
- Le 26 janvier 1950 voit le débarquement du dernier radeau de matériel. Sur 2170 colis seuls 15 ont été perdus à la mer. " À l'unanimité, le 26 janvier est proclamé fête annuelle de l'île Amsterdam".
Le lendemain "le pavillon national est solennellement hissé au sommet du mât".
- Le 16 février 1950 la première baraque est montée. Le camp est entièrement terminé en trois semaines, hormis les aménagements intérieurs.
Le premier campement
1950 - Première installations en dur
- Le 6 février 1951 : la première mission quitte la base et est remplacée par la 2e mission dont le chef de district est l'ingénieur météorologue J Gilbert.

Depuis les missions se relèvent tous les ans.

C'est aujourd'hui la 71e mission qui assure l'héritage de cette première mission, de celles qui ont suivi, et des hommes et femmes qui les ont composées.
Les membres de la 71e mission
 La base de l'île Amsterdam porte aujourd'hui le nom de son premier chef de district : 

Martin de Viviès.
La base Martin de Viviès

Jean-Charles MEGIAS



vendredi 13 décembre 2019

OP3- 2019 - De la logistique, des cérémonies et des émotions



Décembre est toujours un mois particulier pour le district de Saint-Paul et Amsterdam. Il est signe du retour du navire ravitailleur, le Marion Dufresne.

Après trois mois sans aucune visite extérieure, les agents d'Amsterdam bénéficient d'une OP (Opération Portuaire) qui permet le ravitaillement en fret et en carburant, et l'arrivée de nouveaux hivernants de la réserve naturelle nationale et de l'institut polaire français (ou Institut polaire Paul-Émile Victor - IPEV).

Quel que soit le district des îles australes, ces opérations ne peuvent être effectuées que par bateau (d’où l'appellation "Opération Portuaire"), bien qu'elles ne possèdent pas de port. L'aide d'un hélicoptère embarqué est donc indispensable, même si, lorsque les conditions météorologiques et marines (houle) sont optimales (cas assez rare à Amsterdam), un radeau peut être mis à l'eau tracté par une vedette du Marion Dufresne

Sur le district de Saint-Paul et Amsterdam, le ravitaillement se déroule sur quatre OP : approximativement en avril (OP1), en septembre (OP2), début et fin décembre (OP3 et OP4).

L'OP3 2019 vient de se dérouler du 2 au 4 décembre avec beaucoup d'activités, en complément de celles prévues à chaque escale :

- Accueil  de madame Evelyne DECORPS, Préfète, Administratrice supérieure des TAAF, pour sa première visite sur le district, de Cédric MARTEAU, Directeur de l'environnement et de la réserve naturelle nationale et de journalistes de TF1. 
- Arrivée des hivernants qui complètent la 71e mission (objet d'un prochain blog), du personnel inter-district et des touristes.
A peine le pied posé à terre, plusieurs cérémonies ont été organisées :

  • Levée des couleurs 
Salut aux couleurs
  • Dévoilement de la plaque sur la façade de la résidence, commémorant l'inscription des terres australes sur la Liste du patrimoine mondial de l'UNESCO, au titre de la convention concernant la conservation du patrimoine mondial, culturel et naturel. L'inscription sur cette Liste consacre la valeur universelle exceptionnelle de ce bien naturel, classé en réserve naturelle nationale, afin qu'il soit protégé au bénéfice de toute l'humanité.
            
  
  • Remise de la médaille pour acte de courage et de dévouement pour le personnel de la 70e mission qui a participé au sauvetage de marins de l'Austral, le 5 avril 2019. Cette cérémonie a rappelé les actions courageuses des sauveteurs, dans des conditions difficiles et dangereuses. Elle a aussi fait ressurgir toute l'émotion ressentie par ceux qui ont vécu ces heures difficiles.
Les six décorés, de gauche à droite : Edouard BLANDIN, Djoudi BOUYER-MONOT, Augustin CLESSIN, Maxime BREDIN, Jérémy DECHARTRE, Hugo BERTELOOT, en présence de Mme la Préfète Evelyne DECORPS, et du chef de district Jean-Charles MEGIAS

   Le même après-midi et le lendemain, les opérations logistiques se sont poursuivies alors que les autorités et les journalistes se sont intéressés aux missions des hivernants :
  • ornithologues, sismographes, chargés d'études sur le mercure et le CO2 de l'institut polaire français, 
  • agents de la réserve naturelle en charge de l'étude et du suivi de la faune et de la flore (espèces introduites et endémiques, notamment le Phylica Arborea),
Explications par Florian GUILHABERT, en charge du programme de restauration du Phylica
  •  logisticiens des TAAF (militaires, ouvriers, cuisiniers...).
 Madame la Préfète a revêtu les bottes et les gants pour planter un Phylica sur le haut de l'allée Martin de Viviès.                                                                                 










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         Le dernier jour, peu avant le départ du Marion Dufresne et de ses passagers, une dernière cérémonie de dévoilement d'une plaque sur le monument aux morts a eu lieu, en mémoire de Jean-Fabrice LEBON, décédé lors de l'accident de pêche le 5 avril 2019. Là encore, l'émotion a été palpable.
Discours de Mme la Préfète devant l'ensemble des personnels de la base et des invités
Minute de silence
Plaque apposée sur le monument aux morts







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 Puis l'heure du départ est arrivée, en particulier pour certains hivernants :
- Djoudi BOUYER-Monot, médecin du district,
- Mélanie LIBEAU, de la réserve naturelle nationale chargée de la pépinière et du programme de restauration du Phylica,
 - Caroline BOST, vétérinaire, chargée du suivi des gorfous sauteurs et de l'étude de leur mortalité.

 L'heure des séparations est encore un moment difficile aussi bien pour les partants qui quittent "leur" île et pour les restants, qui perdent leurs amis. Les visages sont souriants de tristesse, les yeux rougis par l'émotion.                                                 
                                                                                                                                                                             



 














             Photos : Edourd Blandin, Mélanie Libeau, Jean-Charles Megias